jeudi, novembre 19, 2009

La bataille des tarifs va redimensionner le marché


· Téléphonie mobile: 12% d’usagers changent d’opérateur

· Le prix, la qualité du service… les principales raisons

· Le poids du projet de loi sur la protection du consommateur


Mieux vaut tard que jamais! Comme à l’accoutumée, l’Agence nationale de la réglementation des télécommunications (ANRT) vient enfin de mettre en ligne le tableau de bord trimestriel du secteur télécoms. Cette enquête, qui s’étend de juillet à septembre 2009, livre des indicateurs sur l’évolution du marché du fixe, du mobile et de l’internet. Le régulateur télécoms publie aussi l’étude synthétisée 2008 de l’Observatoire des technologies et de l’information. Elle est en fait disponible depuis juin dernier et a été publiée en exclusivité par L’Economiste (voir édition du 14 juillet 2009).
Globalement, la structure du marché mobile est presque la même.
Certes, la croissance trimestrielle a fait un bond de 6,5%. Et à fin septembre, le nombre des abonnées a atteint 25 millions. En revanche, les abonnements prépayés dominent. Question de pouvoir d’achat. A priori, une baisse des tarifs permettrait de pousser à une migration vers les abonnements post-payés.
La baisse s’impose d’autant plus que le consommateur a du mal à se retrouver dans la jungle des tarifs. Certes, les trois opérateurs les affichent sur leur site. Or, la structure des prix n’est pas la même. Les abonnements prépayés offrent un bel exemple.

· La jungle des tarifs

Chez Wana, on fait valoir le «tarif unique»: quels que soient le type, l’heure et les destinations de l’appel au Maroc -fixe et mobile-, vous ne payez que 3 DH TTC/min. La carte recharge est vendue de 10 à 200 DH. Mais sa date de validité varie d’un ou 6 mois, cela dépend du montant du forfait.
Est-ce là un cas de clause abusive? Sachant qu’un usager qui achète un forfait, de 50 DH par exemple, en détient en principe la propriété. Et acquiert par conséquent le droit d’en disposer librement sans limitation de temps.
Pour Jawal classique de Maroc Telecom, un abonné paye un appel 3,6 DH TTC/min vers un mobile et fixe IAM. S’il s’agit d’un appel vers un autre mobile, de Méditel notamment, le tarif est de 4,80 DH.
Pour les communications vers les fixes, Maroc Telecom distingue dans ses tarifs entre fixe avec mobilité restreinte (4,20 DH) et sans mobilité restreinte (3,60 DH). La communication est donc plus chère lorsqu’un consommateur appelle un numéro Wana: c’est l’unique opérateur qui dispose d’une licence fixe avec mobilité restreinte.
L’opérateur historique s’engage aussi sur «des tarifs uniques et pour toute la journée». Autrement dit, pas de distinction entre période creuse et de pointe.
Contrairement à Wana, son site ne précise pas si la recharge a une date de validité ou pas. Les cartes sont vendues de 5 à 1.200 DH. Signalons toutefois qu’à chaque nouvelle recharge, la validité de la carte à puce est prolongée.
Le Medijahiz Batal opte pour le tarif normal et réduit (de 21h à 8h).
Pour un appel on-net, c’est-à-dire entre abonnés du même opérateur, le coût normal de la communication est de 4,19 DH contre 0,99 DH pour le tarif réduit. Sauf que celui-ci n’est applicable qu’à partir de la 2e minute… Pour un appel vers un autre opérateur, l’abonné au prépayé payera le même prix. Mais en période creuse (21h-8h), il faut débourser 1,89 DH au lieu de 0,99 DH.
Au-delà de la baisse, c’est la lisibilité des tarifs qui fera la différence entre les opérateurs. Et leur mode de calcul surtout. Ce qui pose justement la problématique de la facturation à la seconde au lieu de la minute.

· Les promesses de l’ANRT

Le projet de loi n°31-08 risque de chambouler relativement la donne. Si jamais il est adopté dans sa version actuelle, l’information du consommateur sera solennellement consacrée. Elle est prévue par son chapitre premier, intitulé «obligation d’information générale». Le texte législatif est actuellement à la Chambre des représentants. Dans ce scénario, la société civile, surtout les associations de consommateurs, devra activer ses réflexes de veille. En attendant, la baisse des prix est, paraît-il, une des grandes visées de la note d’orientation 2009-2013. C’est du moins les intentions déclarées du régulateur télécoms (ANRT). Cette feuille de route, qui trace les grandes lignes du secteur télécoms, a été «transmise depuis quelques mois déjà à la Primature». Il y a un retard, sachant qu’elle devait être prête début 2009. Et prendre aussi la relève de la note d’orientation 2004-2008 qui a pris fin avec l’octroi de la licence 2G à Wana.
En ces temps difficiles, le gouvernement El Fassi semble prendre son temps. D’abord parce qu’il est occupé par le projet de loi de Finances 2010.
Ensuite, n’oublions pas que le secteur pèse lourd. Le rapport 2008 de Bank Al-Maghrib confirme que la manne télécoms a «relativement préservé l’économie des turbulences mondiales». Dans son rapport d’activité 2007, l’ANRT parle de «30 milliards de DH de chiffre d’affaires, une participation de 7% au PIB, 37.000 salariés, premier contributeur fiscal et la moitié des investissements directs étrangers durant les cinq dernières années…». Les opérateurs télécoms, qui passeront à 10% du PIB en 2010, sont également de gros annonceurs. Statuts économique et politique se conjuguent donc.

· Usage et fidélité

L’enjeu est qu’après les années d’euphorie, le marché arrive à maturité.
Pour le fixe, l’ANRT constate «une hausse de 100% entre 2004-2007. La pénétration des lignes ralentit en 2008 alors même qu’elle reste positive». A fin septembre 2009, la croissance trimestrielle du marché du fixe est de près de 4%.
Côté téléphonie mobile, les ménages continuent à s’équiper (65,7%).
Principale utilisation, la réception et l’émission des appels. Et les services de messagerie SMS restent fortement sollicités. Par ailleurs, 30% des utilisateurs de mobile sont friands de musique, vidéo et photo. D’où l’émergence d’un nouvel opérateur qui se dédie essentiellement à la fourniture de ce type de contenu.
Un indicateur plus que révélateur: en 2008, «le changement d’opérateur est relativement élevé (12%)», selon l’Observatoire des technologies et de l’information.
Quatre éléments expliquent cette migration: le prix de la communication, les offres promotionnelles, la couverture réseau et la qualité de service. L’étude confirme donc l’émergence d’une culture consumériste: des clients/consommateurs plus exigeants et plus vigilants. Les opérateurs télécoms sont acculés à prendre en compte cette donne. Fini l’époque d’un abonnement à n’importe quel prix. Ainsi, sur 25 millions d’usagers de téléphonie mobile, près de 9% prévoient, durant cette année, de changer d’opérateur.

· TI: Un tigre au lieu d’un chat

Le marché de l’internet enregistre l’une des plus fortes progressions. Ils sont à fin septembre plus d’un million d’abonnés, soit une croissance trimestrielle de près de 9% et de 52% par rapport à septembre 2008.
Les abonnements internet bas débit et ADSL ont reculé. En revanche, l’internet 3G ou sans fil gagne du terrain. Celle-ci «représente un peu plus de 54% du parc global», selon le dernier tableau de bord de l’ANRT. Pour l’internet sans fil (3G) Wana est leader. Maroc telecom confirme sa suprématie historique dans le marché ADSL.
Curieusement, seuls 31% sur 1.300 sondés connaissent la 3G! Même si l’équipement en ordinateur personnel a augmenté en 2008, «le prix trop élevé est un frein à l’achat», selon l’enquête TI de l’Observatoire. L’achat en ligne n’attire pas toujours grand monde et dans les entreprises l’on compte un ordinateur pour deux employés.
Contrairement au secteur primaire, celui des technologies est évidemment le mieux équipé. Le parc relativement vétuste est constitué d’ordinateurs de bureau. Sur un demi-millier d’entreprises, la part d’investissement en technologie de l’information (TI) est faible et elle l’est beaucoup plus pour la formation. Respectivement 9 et 4%. La moitié des entreprises enquêtées comptent entre 4 et 19 salariés. Le reste emploie 20 collaborateurs et plus.
C’est pour remédier à ce déficit que le plan Maroc Numéric 2013 a été lancé en octobre dernier. Avec un budget de 5,2 milliards de DH, le pays ambitionne à devenir un tigre technologique.

Faiçal FAQUIHI

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire

Merci, votre commentaire sera publié une fois modéré.

Suivez nous sur Twitter @SmsFabor